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Jean C. Baudet

L’éditologie est un anti-humanisme

Je voudrais ici défendre l’éditologie (1) contre un certain nombre de reproches.

On me dit qu’elle est naïve et qu’elle n’atteint pas le niveau du concept. Mais la naïveté s’exprime justement chez ceux qui croient au concept, qui se gargarisent de distinguos et qui prennent la philosophie pour un exercice d’équilibrisme phraséologique, un jeu de société pour cette frange de la bourgeoisie qui se dit « intellectuelle ». L’éditologie appelle un chat un chat, et la science, c’est-à-dire le savoir vérifiable, un ensemble de textes édités (2). L’éditologie écarte tous les écueils du penser-ensemble, et sait que la vérité – l’odieuse vérité – se découvre dans la solitude du cogito, loin des sourires de l’humoriste ou des grâces du diplomate et de la femme-du-monde. Loin de l’auto-censure et des politesses. L’éditologie aboutit ainsi au discours véritable qui abolit tous les discours, et qui s’exprime par l’insulte et les inconvenances. Car la vérité est obscène, et s’appelle la douleur. Le contraire absolu de la culture, qui n’est qu’accumulation de pacotilles et de faux-semblants. On me dit que l’éditologie est vague, imprécise, et certains iraient jusqu’à prétendre qu’elle est fausse. Mais les intuitions premières de l’éditologie sont aussi apodictiques que ma réalité (3), et l’on ne peut sérieusement ni nier que le savoir-science est l’extension du vérifiable (vérifiable par les vécus du philosophe, et la critique du psychologisme, par Husserl et ses émules, ne peut conduire à autre chose qu’à la perception du conscient, c’est-à-dire au moi), ni nier que ce savoir se manifeste sous la forme de textes ou discours (4), ni nier que ces textes sont menés à l’existence par l’édition. Ainsi l’éditologie est précise et cruelle comme un scalpel bien aiguisé, parce qu’elle est basée sur une observation sociale indépassable (la communication, le langage…), et elle est vraie parce qu’elle se déduit de l’expérience du moi souffrant, quand mon parcours tragique dans la solitude de ma nuit dévoile ma singularité qui se dissout totalement dans l’universalité de l’homme qui s’interroge seul, c’est-à-dire sans masque et sans juges.

 

(1) J.C. Baudet : « Editologie et scientificité », Communication & Cognition 23(4): 323-329, 1990.

(2) J.C. Baudet : « Editologie et sociolinguistique », Cahiers de linguistique sociale (Rouen) 18: 81-99, 1991.

(3) J.C. Baudet : « Moi et les autres », Revue Générale 142(6/7): 49-53, 2007.

(4) J.C. Baudet : « De quelques discours et du reste », Revue Générale 143(1): 25-32, 2008.

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