Sur les grands hommes

A sa mort, Aristote a laissé l’immense construction de la logique. Diophante a laissé l’algèbre, Descartes a laissé la géométrie analytique, Lavoisier a laissé la chimie quantitative, Beethoven a laissé neuf symphonies, Darwin a laissé la théorie de l’évolution des espèces vivantes, Mendéléev a laissé le tableau périodique des éléments chimiques, Maxwell a laissé les équations qui unifient l’optique et l’électromagnétisme, Freud a laissé la psychanalyse, Gramme a laissé la dynamo, Cantor a laissé la théorie des ensembles, Flaubert a laissé quelques romans, Verlaine a laissé quelques poèmes (« Les sanglots longs des violons blessent mon cœur »…), Einstein a laissé la théorie de la relativité, Rutherford a découvert le proton, Chadwick a découvert le neutron, Fermi a construit le premier réacteur nucléaire, Pauling a établi la structure moléculaire des protéines, Watson et Crick ont établi la structure des acides nucléiques, Simenon a laissé quelques centaines de romans captivants, von Braun a construit une fusée qui permit aux hommes de marcher sur la lune. Mais ces grands hommes (et quelques centaines d’autres) qui ont réalisé chacun une œuvre surprenante et admirable ne furent et ne sont que quelques milliers, alors que l’Humanité, depuis ses lointaines origines, rassemble des milliards d’êtres doués, paraît-il, d’imagination et d’intelligence, mais qui n’ont rien produit d’autre que leurs déjections de CO2, de sueur, d’urine et d’excréments, et ne transmirent donc rien à leur postérité.

Et je m’interroge à propos des réalisations sublimes de quelques rares individus parmi quelques milliards de « frères humains », qui ont vécu ou qui vivent encore sans rien produire pour participer à la civilisation.

Et je me demande « que laisserais-je à la fin de mon passage dans l’existence ? ».

Comments

[Jean-François Foulon]

Que laissera chacun d'entre nous (au futur simple, c'est un fait réel) ? Pas grand chose, malheureusement. A peine si par nos idées et nos convictions aurons-nous influencé un peu l'évolution des mentalités. Sinon, rien, en effet.